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ARMES CHIMIQUES

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Des centaines de milliers de victimes de l'Agent Orange/Dioxine utilisé par l'armée américaine pendant la guerre du Vietnam, leurs familles et leur descendance, dont beaucoup survivent en marge de la société dans des conditions extrêmement difficiles, un peu plus de 50 ans après les premiers épandages, ont cruellement besoin d'aide !

sommaire



1- Agent Orange au Vietnam : arme chimique illégale par André Bouny


2- Une guerre chimique sans fin : l’Agent orange au Vietnam par M.H.Lavallard


3- Syrie, États-Unis, Corée du Nord : la présence des armes chimiques dans le monde


4- Les armes chimiques


5- Le désarmement chimique


6- Protocole de Genève


7- Armes chimiques, bombe atomique du pauvre


Credit: Brian Driscoll

La quatrième génération de l'agent orange/dioxine arrive et les dégâts sanitaires sont toujours là, toujours aussi catastrophiques. Photo : Duong Ngoc/VNA/CVN

crédit photo Mme Nguyen Van Mâu

1- Agent Orange au Vietnam : arme chimique illégale

de : André Bouny


samedi 7 septembre 2013


Tout d’abord, il est nécessaire de faire un effort mental suffisamment grand pour consentir à ce qu’il y ait des armes légales. A la suite de quoi, il faut accepter l’existence des lois et coutumes qui régissent la guerre. Et même si cela est au-dessus de nos forces, ainsi sont les règles de notre monde.

Une arme est illégale de deux manières : soit un traité particulier l’interdit, soit elle viole les lois et coutumes existantes qui régissent la guerre - on aperçoit ici la menace inhérente dans l’emploi du terme « coutumes » qui désigne les us antécédents et, par conséquent, tente d’endiguer un présent toujours enclin à violer les pratiques du passé.


Dans le cas où un traité interdit une arme, elle est illégale pour les seuls pays qui l’ont signé et ratifié. Mais si cette arme est illégale au regard d’une loi existante, elle devient illégale pour l’ensemble des pays.


Les lois et coutumes existantes de la guerre comprennent tous les traités qui régissent les interventions militaires et l’emploi des armes ainsi que le Droit international coutumier. Ils constituent ainsi l’essentiel du Droit international humanitaire. On peut citer les conventions de La Haye de 1899, 1907, et 1954 ; Cconventions de Genève 1864, protocole de Genève de 1925, 1926 embryon des quatre conventions de 1949, ensuite viennent celles de 1951 et 1957, puis les deux protocoles additionnels de 1977 venus reconnaître les « progrès » techniques dévolus à l’armement durant la guerre du Viêt-nam -que n’ont pas signé les USA - complétés par un troisième protocole additionnel en 2005 ; convention sur les armes biologique de 1972, dont le renforcement de novembre 2001 a échoué ; convention sur les armes chimiques de 1993, etc., etc.


‍ A l’époque de la rédaction des textes sur l’interdiction d’utiliser le poison comme arme de guerre, on ne connaissait pas les mots « herbicides » et « défoliants » qui peuvent, comme l’Agent Orange, contenir le pire des poisons. Les Grecs et les Romains de l’Antiquité avaient pour coutume de s’interdire l’emploi du poison et des armes empoisonnées. En Inde, cinq cent ans av. J.-C., les lois de Manu relatives au droit de la guerre interdisaient l’emploi de telles armes. Mille ans plus tard, les Sarrasins tiraient du Coran une conduite de la guerre prohibant l’empoisonnement.

En 1943 et 1944, les Etats-Unis d’Amérique avaient déjà étudié douze mille produits chimiques et en avaient sélectionné sept mille comme possibles armes de guerre... D’ailleurs, en 1945, un crime prémédité contre l’humanité est étudié en vue de détruire les rizières autour des grandes villes du Japon. Ces produits chimiques étaient les précurseurs des agents chimiques utilisés au Viêt-nam.


L’Agent Orange contenant du poison tombe sous le coup du protocole de Genève de 1925 que les USA n’ont pas signé. Curieusement, ils le signeront le 10 avril 1975, comme s’il s’agissait d’une culpabilité envers le forfait commis de fraîche date entre 1961 et 1971 au Viêt-nam. Certes, il ne peut y avoir d’effet rétroactif de la loi. Mais l’Agent Orange tombe aussi sous le coup de l’Article 23 de la convention (IV) de La Haye de 1907, qui dit : « Outre les prohibitions établies par les conventions spéciales, il est interdit : a) d’employer du poison ou des armes empoisonnées  » signée par les USA le 18/10/1907 et ratifiée le 27/11/1909. Si les arcanes de la procédure actuelle en terre américaine aboutissaient à l’impunité, le seul recourt contre l’utilisation de l’Agent Orange au Viêt-nam pourrait bien être l’arsenal des textes et normes du droit international humanitaire.


Le droit international humanitaire dégage quatre grandes règles en ce qui concerne les armes :


1) Les armes ne peuvent être utilisées que dans le champ « légal » des combats, défini comme cibles militaires de l’ennemi en guerre. Les armes ne doivent pas provoquer un effet négatif au-delà de ce champ « légal » de bataille : c’est la règle territoriale.


2) Les armes ne peuvent être utilisées que pendant la durée du conflit. Une arme qui est utilisée ou continue d’agir après la fin de la guerre viole cette réglementation : c’est la règle temporelle.


3) Les armes ne doivent pas être excessivement inhumaines. La Convention de La Haye de 1899 et de 1907 utilise les termes « souffrances inutiles » et « blessures superflues » : c’est la règle d’humanité.


4) Les armes ne doivent pas avoir un effet négatif démesuré sur l’environnement naturel : c’est la règle environnementale.


L’Agent Orange viole ces quatre règles.


1 bis) L’Agent Orange est dispersé par voie aérienne et n’atteint pas seulement le champ des cibles « légales » mais aussi largement les lieux civils alentours et même les pays voisins avec lesquels l’utilisateur n’est pas en guerre, sans oublier les infiltrations et les ruissellements qui transportent les molécules sur d’autres surfaces de terre, nappes, rivières, mers, et bouleversent les écosystèmes. Il ne peut pas être limité aux champs de bataille « légaux » et viole la règle territoriale.


2 bis) L’Agent Orange reste dans les zones d’épandages et de stockages ; ses molécules qui ont une vie durable et un potentiel pathogène et tératogène agissent sur les anciens combattants comme sur les civils bien après que la guerre soit terminée et même sur les enfants à naître sur plusieurs générations sans que l’on sache quand cela prendra fin. Il ne peut pas être extirpé quand la guerre est finie et continue d’agir après la fin des hostilités etviole la règle temporelle.


3 bis) L’Agent Orange est inhumain à cause de la façon dont il tue - cancers, maladies multiples, malformations génétiques, absence des membres, bébés déformés et non viables, touchant des enfants qui n’ont jamais été des cibles militaires et qui sont nés après la fin de la guerre. Sa nature tératogène et l’atteinte possible du patrimoine génétique des générations futures font qu’il est possible de considérer l’utilisation de cette arme comme un génocide. Il est inhumain et viole la règle d’humanité.


4 bis) L’Agent Orange cause des dommages considérables et irréversibles à l’environnement naturel comprenant la disparition des forêts de différentes natures, la contamination des sols et de l’eau, des terres agricoles dont l’exploitation sert à la subsistance des populations civiles, bien au-delà de la durée de vie de ces populations. Le nettoyage est une science inexacte, qui coûte très cher et dépasse les capacités de financement d’un pays pauvre. L’Agent Orange est une arme qui ne peut être utilisée sans causer des dommages excessifs à l’environnement naturel puisque c’est le premier de ses buts, il viole la règle environnementale.


L’Agent Orange est donc bien une arme, une arme chimique, une arme chimique illégale.


L’une des clauses les plus utiles du traité sur le droit humanitaire est la « clause Martens » de la convention de La Haye de 1907 qui est reprise dans les traités suivants concernant le droit humanitaire. La clause Martens stipule que dans les situations où il n’existe pas de clause spécifique dans un traité (ce qui est le cas pour l’Agent Orange) la communauté internationale est néanmoins liée par « les règles de principes de la loi des nations, issues des usages établis parmi les peuples civilisés, par les lois humanitaires et ce que dicte la conscience publique. »


Selon le droit international, il existe un certain nombre d’exigences pour remédier aux violations des conventions de Genève et autres règles formant les lois et coutumes de la guerre. Une exigence minimum du devoir de réparer l’utilisation d’armements illégaux c’est la compensation des victimes. Cela peut comprendre les victimes civiles et militaires de guerre. Pour remédier au maximum à l’utilisation de l’Agent Orange, c’est un devoir de fournir tous les renseignements sur la fabrication de cette arme et de son épandage. En ce qui concerne les dommages environnementaux, les utilisateurs de l’Agent Orange sont obligés d’effectuer un nettoyage tangible des zones contaminées. Quand des terres et des ressources en eau ne peuvent être effectivement nettoyées, l’Etat qui a causé les dommages doit payer une indemnité d’un montant égal à la perte d’exploitation des terres et ressources du patrimoine national et du coût des poursuites juridiques. Le nettoyage environnemental pourrait atteindre des chiffres prodigieux.


En plus de la responsabilité pour les dommages causés aux victimes et à leur environnement, les utilisateurs de l’Agent Orange devraient être sanctionnés légalement selon les clauses des lois humanitaires existantes. Par exemple, la convention de Genève exige des Etats membres signataires qu’ils aient des mécanismes légaux internes pour juger les personnes qui sont soupçonnées d’avoir commis des violations sérieuses du droit humanitaire. De plus, l’article 146 stipule que tous les Etats signataires ont le devoir de rechercher les violateurs mis en cause et de les juger devant leurs propres tribunaux quelle que soit leur nationalité. L’article 148 interdit à tout Etat de s’absoudre lui-même ou d’absoudre un autre Etat de la responsabilité de violations sérieuses. Les effets génocidaires sur les peuples bien après la fin des hostilités constituent une autre base pour considérer l’utilisation de l’Agent Orange comme un crime contre l’humanité.


De certains extraits du rapport de Karen Parker sur les armements à l’uranium appauvri transposés et développés à l’Agent Orange par André Bouny, père adoptif d’enfants vietnamiens, président du « Comité International de Soutien aux victimes vietnamiennes de l’Agent Orange et au procès de New York » (CIS)


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2- Une guerre chimique sans fin : l’Agent orange au Vietnam


Cet article, écrit par Marie-Hélène Lavallard qui est membre du Bureau de l’AAFV, est paru dans Recherches Internationales, N° 86, avril-juin 2009


La guerre du Vietnam (1961-1975) est connue pour les bombardements massifs au Nord Vietnam. Plus insidieuse, d’abord ignorée du grand public, la guerre chimique livrée au Sud de 1961 à 1971 a entraîné des conséquences dramatiques qui durent encore. C’est un désastre environnemental immense et une catastrophe humaine multiforme : sanitaire, économique et socioculturelle. Le gouvernement américain et les firmes de produits chimiques impliquées éludent leurs responsabilités. Une conspiration du silence a caché pendant des années la toxicité des défoliants employés. Les responsables ont le front de la nier encore aujourd’hui. L’aide humanitaire est sans commune mesure avec les besoins. C’est au niveau des États que doivent s’organiser le soutien au Vietnam et l’exigence de justes réparations.


l'article complet : https://www.recherches-internationales.fr/RI86_pdf/RI86_LAVA_pdf.pdf

3- Syrie, États-Unis, Corée du Nord : la présence des armes chimiques dans le monde


Par La rédaction de RTL.fr | Publié le 10/09/2013 à 19h56


international

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Les armes chimiques sont encore nombreuses dans le monde

INFOGRAPHIE - Alors que la Russie a proposé de mettre sous clé par l'ONU les armes chimiques syriennes, quel pays possède encore un arsenal de ce type?

L’attaque au gaz sarin en Syrie a réveillé la question des armes chimiques, dangereuses et pourtant strictement contrôlées au niveau mondial.


Depuis 1997, la convention sur l’interdiction des armes chimiques interdit la production, le stockage et l’utilisation des armes chimiques, comme le gaz sarin. L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, une branche de l’ONU, veille à ce que les stocks existants soient détruits.


Mais la Syrie, ainsi que l’Egypte, l’Angola, le Sud-Soudan et la Corée du Nord,n’ont jamais signé le traité international. De même, Israël et le Myanmar ont signé mais pas ratifié ce traité, qui n’est donc pas en vigueur dans ces pays. Cela ne veut pas dire pour autant que ces pays possèdent des armes chimiques, leur situation est inconnue en l'absence d'autorisation de contrôle de la part de l'ONU.


Les Etats-Unis et la Russie propriétaires d’un important arsenal

Sur les 189 pays signataires, sept ont déclaré posséder des armes chimiques, parmi lesquels les États-Unis, la Russie, l’Inde et l’Iraq. Au total, cela représente 71 196 tonnes d’agents chimiques hautement toxiques. Au 31 juillet 2013, seul 81,1% des ces stocks avaient été éliminés. Certains pays, comme l'Inde ou l'Albanie ont complètement détruit leurs stocks, mais d'autres, comme les États-Unis et la Russie, possèdent encore des armes chimiques.


Enfin, treize pays possèdent des installations capables de produire des armes chimiques, dont la France. Tous ces sites sont en cours de fermeture ou de reconversion.


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4- Les armes chimiques


Les armes chimiques utilisent délibérément les propriétés toxiques de substances chimiques pour tuer ou pour blesser. Elles sont généralement considérées comme des armes de destruction massive, tout comme les armes biologiques et nucléaires.


Sur un plan militaire, les armes chimiques sont surtout utilisées dans des situations tactiques. Elles peuvent être très efficaces dans des activités militaires classiques.


Dans des opérations offensives, des attaques surprise de courte durée mais très intenses avec des substances non persistantes peuvent affaiblir des défenses ennemies le long et à l'arrière de zones devant être prises, tandis que des agents persistants peuvent être utilisés pour protéger les flancs de contre-attaques ou pour empêcher le retrait de forces ennemies.

Dans des opérations défensives, les agents non persistants peuvent servir à perturber des zones de transit, des postes de commandement ou des zones de tirs d'appui de l'ennemi. Quant aux agents persistants, ils peuvent être utilisés pour conduire des forces ennemies dans des pièges. Les armes chimiques peuvent aussi être utilisées dans des batailles navales ou pour attaquer des bases aériennes.

Quel que soit le cas, l'emploi des armes chimiques complique et ralentit sérieusement toutes les opérations militaires, ce qui peut être à l'avantage de la partie préférant un rythme de bataille plus lent. En outre, les armes chimiques ayant le potentiel d'infliger des pertes importantes, leur utilisation est un avantage pour les parties numériquement inférieures ne pouvant surmonter cette infériorité par d'autres moyens.


Contre les civils, les armes chimiques sont celles qui conviennent le mieux pour des attaques terroristes. La diffusion de substances toxiques dans des endroits clos pour toucher des civils sans protection peut avoir un impact considérable. Citons le cas de l'attaque au sarin réalisée par la secte Aum Shinrikyo dans le métro de Tokyo, en 1995, qui tua 12 personnes et en envoya plusieurs milliers à l'hôpital. Des frappes stratégiques contre des zones civiles peuvent aussi être envisagées, mais elles sont nettement moins probables en raison d'une efficacité inférieure.


En tant qu'armes de destruction massive, les armes chimiques peuvent intéresser des acteurs étatiques et non étatiques qui cherchent à se doter de capacités de destruction massive. La mise au point, la fabrication et l'entretien des armes chimiques sont nettement plus faciles et coûtent beaucoup moins cher que ceux des armes nucléaires.


Il n'empêche que, d'un point de vue militaire, les armes chimiques sont inférieures aux armes nucléaires en raison de leurs effets imprévisibles et des autres inconvénients.


Un certain nombre de pays ont fabriqué des armes chimiques et de nombreux autres disposent des capacités nécessaires pour les produire.


Les armes chimiques sont toutefois interdites par le droit international depuis 1993.


Source : Les termes de la sécurité : un lexique pour la maîtrise des armements, le désarmement et l'instauration de la confiance, Chapitre 5 - Armes chimiques




5- Le désarmement chimique


OIAC (Organisation pour l'interdiction des armes chimiques)


Bref historique de la Convention


La Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (encore appelée Convention sur les armes chimiques) a été ouverte à la signature lors d'une cérémonie qui a eu lieu à Paris le 13 janvier 1993. Au cours des deux premiers jours, 130 États ont signé la Convention. Quatre ans plus tard, en avril 1997, la Convention entrait en vigueur avec 87 États parties, alors que la ratification par 65 États au moins (obtenue en novembre 1996) était une condition préalable nécessaire au lancement de la période de 180 jours avant l'entrée en vigueur de la Convention. En juillet 2003, la Convention comptait 153 États parties et disposait d'une organisation d'exécution entièrement fonctionnelle, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).


Il a fallu près de 20 ans de négociations dans le cadre de la Conférence du désarmement de Genève pour que la Convention voie le jour. Les États concernés cherchaient à mettre au point un traité international interdisant les armes chimiques, destiné à garantir leur élimination à l'échelle mondiale. Cet objectif a bien été atteint.


La Convention est unique en son genre, car il s'agit du premier traité multilatéral qui interdit toute une catégorie d'armes de destruction massive et prévoit la vérification internationale de la destruction de celles-ci. Il s'agit en outre du premier traité de désarmement négocié dans un cadre entièrement multilatéral, ce qui ouvre la voie à une plus grande transparence et à une égalité d'application à tous les États parties. La Convention a également été négociée avec la participation active de l'industrie chimique du monde entier, garantissant ainsi le concours continu de cette dernière au régime de vérification de l'industrie établi par la Convention sur les armes chimiques. La Convention prévoit l'inspection des installations de l'industrie afin de garantir que les produits chimiques toxiques servent uniquement à des fins non interdites par la Convention.


Globalement, la communauté internationale a réussi à mettre au point un traité qui permet à la fois de vérifier la destruction des armes chimiques à l'échelle mondiale et de garantir la non-prolifération de ces armes et des produits chimiques toxiques entrant dans leur fabrication. Par ailleurs, la Convention favorise la coopération internationale entre les États parties dans l'utilisation pacifique de la chimie et prévoit une assistance et une protection destinées aux États parties menacés ou attaqués par des armes chimiques.


Avant d'examiner la Convention plus en détail, il serait judicieux de s'interroger sur le bien-fondé d'un tel traité. D'où vient la menace des armes chimiques ?


Bref historique de l'emploi des armes chimiques


Des produits chimiques sont employés en tant que moyens de guerre depuis des millénaires (flèches empoisonnées, goudron en fusion, vapeurs d'arsenic, fumées nocives, etc.), mais la guerre chimique moderne est née sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale.


Au cours de la Première Guerre mondiale, du chlore et du phosgène sous forme gazeuse, stockés dans des conteneurs, ont été répandus sur le champ de bataille et dispersés par le vent. Ces produits chimiques étaient fabriqués en grandes quantités au début du XXe siècle et ont été employés comme armes pendant la longue guerre des tranchées. La première attaque à grande échelle au chlore gazeux fut lancée le 22 avril 1915 à Ypres (Belgique). L'emploi d'armes chimiques de différents types comme l'ypérite a provoqué la mort de 90 000 personnes et fait près d'un million de victimes pendant la guerre. Les victimes de la guerre chimique en ont gardé des séquelles pour le restant de leurs jours; ainsi, toute une génération a porté les cicatrices des événements survenus à Ypres pendant la Première Guerre mondiale. À la fin de la Première Guerre mondiale, 124 000 tonnes d'agents chimiques avaient été utilisées. Les systèmes vecteurs des agents chimiques ont évolué durant la première moitié du XXe siècle et ont accru la force meurtrière et mutilante, déjà effrayante, de ces armes, sous la forme d'obus d'artillerie, d'obus de mortier, de bombes aériennes, de réservoirs pulvérisateurs et de mines terrestres.


Ayant assisté aux effets de ces armes lors de la Première Guerre mondiale, peu de pays semblaient vouloir être les premiers à employer des armes chimiques encore plus meurtrières sur les champs de bataille de la Deuxième Guerre mondiale. Toutefois, de nombreux pays se préparaient à riposter de façon similaire au cas où des armes chimiques auraient été employées comme moyens de guerre. Des armes chimiques furent déployées à grande échelle sur presque tous les théâtres d'opérations des deux guerres mondiales, léguant un héritage d'armes chimiques anciennes ou abandonnées qui posent encore des problèmes pour de nombreux pays.


Pendant la guerre froide, les États-Unis et l'Union soviétique ont conservé d'énormes stocks d'armes chimiques atteignant des dizaines de milliers de tonnes. La quantité d'armes chimiques détenues par ces deux pays était suffisante pour faire disparaître de la Terre la plus grande partie de l'humanité et des animaux.


L'Iraq a eu recours à des armes chimiques en Iran, durant la guerre entre ces deux pays dans les années 1980, ainsi qu'à de l'ypérite et à des agents neurotoxiques en 1988, contre les Kurdes de Halabja, au nord de l'Iraq. Les images terrifiantes des victimes de Halabja ont choqué le monde entier au moment des négociations de la Convention sur les armes chimiques, à Genève. Les deux exemples les plus récents d'emploi d'armes chimiques ont été l'empoisonnement au sarin perpétré en 1994 à Matsumoto, communauté résidentielle du Japon, et l'attaque au sarin perpétrée en 1995 dans le métro de Tokyo, tous deux commis par la secte apocalyptique Aum Shinrikyu. Ces attaques ont de nouveau appelé l'attention de la communauté internationale sur l'emploi potentiel d'armes chimiques par des terroristes et sur les dangers que constituent les armes chimiques.


L'effet dévastateur que les armes chimiques ont eu par le passé et le risque d'emploi d'agents chimiques modernes - encore plus meurtriers - non seulement par des États en guerre mais aussi dans d'autres conflits violents et par des acteurs non étatiques, militent en faveur de l'effort international déployé pour faire respecter l'interdiction de ces armes et oeuvrer à leur élimination complète à l'échelle mondiale.


Brève description d'une arme chimique


Une arme chimique, dans son acception générale et classique, est un produit chimique toxique contenu dans un vecteur, tel qu'une bombe ou un obus.


La Convention définit les armes chimiques de manière plus globale. Cette expression s'applique à tout produit chimique toxique, ou à son précurseur, pouvant causer la mort, des blessures, une incapacité temporaire ou une irritation sensorielle par son action chimique. Les munitions ou autres vecteurs d'armes chimiques, remplis ou non, sont également considérés eux-mêmes comme des armes.


Les produits chimiques toxiques conçus ou utilisés en tant qu'armes chimiques peuvent être classés en plusieurs catégories : les agents suffocants, vésicants, hémotoxiques et neurotoxiques. Les plus connus sont les suivants : les suffocants (chlore et phosgène), les vésicants (ypérite et lewisite), les hémotoxiques (cyanure d'hydrogène) et les neurotoxiques (sarin, soman et VX).


À l'évidence, certains produits chimiques toxiques et/ou leurs précurseurs sont utilisés par l'industrie dans le monde entier. Par exemple, des produits chimiques toxiques sont utilisés comme matières premières essentielles ou comme antinéoplasiques (qui empêchent la prolifération cellulaire), fumigants, herbicides ou insecticides. Ils sont considérés comme des armes chimiques s'ils sont fabriqués et stockés en quantités supérieures aux besoins liés à des fins non interdites par la Convention.


La Convention vise à assurer que les produits chimiques toxiques ne sont mis au point et fabriqués qu'à des fins sans rapport avec les armes chimiques. Il ne doit y avoir aucun détournement des techniques chimiques, et l'OIAC est chargée de surveiller l'industrie chimique pour vérifier que tel est le cas. Pour aider l'OIAC dans sa tâche, la Convention divise en trois tableaux les produits chimiques toxiques et les précurseurs susceptibles d'être employés comme armes chimiques ou pour la fabrication d'armes chimiques. Les produits chimiques du Tableau 1 ont été utilisés comme armes chimiques dans le passé et/ou n'ont qu'un nombre limité d'utilisations pacifiques, voire aucune, et représentent donc la menace la plus directe pour la Convention. Les produits chimiques du Tableau 2 sont essentiellement des précurseurs des produits chimiques du Tableau 1, et la plupart ont des utilisations industrielles occasionnelles. Les produits chimiques du Tableau 3 sont fabriqués en grandes quantités à des fins commerciales, mais dans certains cas ils ont été employés comme agents de guerre chimique et peuvent aussi servir de précurseurs de produits chimiques des Tableaux 1 ou 2. Les installations de fabrication de nombreux produits chimiques organiques appelés produits chimiques organiques définis doivent également être déclarées et sont assujetties aux activités de vérification.


Pour faciliter les procédures de destruction et de vérification, les armes chimiques sont officiellement classées selon trois catégories. La catégorie 1 comprend les agents chimiques du Tableau 1 et les munitions qui en sont remplies. La catégorie 2 comprend les munitions remplies d'autres produits chimiques toxiques et de tout autre agent chimique utilisé dans des armes, à l'exclusion des produits chimiques du Tableau 1. La catégorie 3 comprend les munitions et les dispositifs non remplis, et tout autre matériel spécifiquement conçu pour contribuer au déploiement d'armes chimiques. La Convention prévoit des délais pour la destruction des trois catégories d'armes chimiques.


Les parties ci-après décrivent de manière plus détaillée les efforts déployés depuis XXVIIe siècle par la communauté internationale en matière de désarmement chimique, la structure et le champ d'application de la Convention sur les armes chimiques, la structure et le fonctionnement de l'OIAC et la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques depuis 1997.


Les agents neurotoxiques


Les "agents neurotoxiques", encore appelés "gaz neurotoxiques", figurent au nombre des armes chimiques les plus connues. Ils doivent leur nom à leur effet sur le corps humain. Composés organophosphorés, ils se divisent en deux familles de produits chimiques : "les agents G" (tabun, sarin, soman, etc.) et "les agents V" (VA, VG, VX, etc.). Bien qu'ayant des compositions chimiques différentes, les agents G et les agents V ont le même effet.


Des signaux électriques sont échangés entre le cerveau et les différentes parties du corps, au moyen des cellules nerveuses (neurones). Au point de contact (synapse) entre deux cellules nerveuses, il y a un espace. Pour permettre à une impulsion électrique de traverser cet espace, les cellules nerveuses génèrent spontanément un transmetteur chimique. Il existe plusieurs transmetteurs de ce type dans différentes parties du système nerveux, dont l'acétylcholine. Dès que le signal électrique a traversé l'espace, l'acétylcholine est immédiatement hydrolysée par catalyse sous l'action de l'enzyme acétylcholinestérase. Les agents neurotoxiques inhibent cette enzyme, ce qui l'empêche de décomposer l'acétylcholine. Il en résulte la paralysie rapide des cellules nerveuses dans l'ensemble du corps. Non traitée, cette paralysie entraîne rapidement la mort.


Les agents neurotoxiques peuvent être dispersés sous forme de liquides ou au moyen d'aérosols, ce qui leur permet d'être inhalés ou absorbés par la peau. Ils sont tous extrêmement toxiques. Ainsi, absorbée par la peau, une seule goutte de VX de la taille d'une tête d'épingle suffit largement à causer la mort.


Histoire du désarmement chimique


Depuis aussi longtemps que des produits chimiques sont employés comme moyens de guerre, des efforts sont déployés à l'échelle internationale pour faire obstacle à cette utilisation. Le premier accord international limitant l'emploi des armes chimiques date de 1675, lorsque l'Allemagne et la France signèrent un traité, à Strasbourg, interdisant l'emploi de balles empoisonnées.


Près de deux siècles plus tard, en 1874, un nouveau traité ou accord de même nature était conclu : la Convention de Bruxelles sur les lois et coutumes de la guerre. La Convention de Bruxelles interdisait l'emploi de poison ou d'armes empoisonnées et l'emploi d'armes, de projectiles ou de matériel causant des souffrances inutiles. Avant la fin du siècle, un troisième accord était conclu ; une conférence internationale de la paix, tenue à La Haye en 1899, aboutissait à la signature d'un accord interdisant l'emploi de projectiles chargés de gaz toxique.


Au lendemain de la Première Guerre mondiale, durant laquelle le monde avait vu les horreurs de la guerre chimique à grande échelle, la communauté internationale redoubla d'efforts pour interdire l'emploi des armes chimiques et empêcher que de telles souffrances soient de nouveau infligées aux militaires et aux populations civiles. Le résultat de ce nouvel engagement mondial fut le Protocole de Genève de 1925 concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques.


Toutefois, le Protocole de Genève n'interdit pas la mise au point, la fabrication, ou la possession d'armes chimiques, mais seulement l'emploi d'armes chimiques et bactériologiques (biologiques) comme moyens de guerre. En outre, de nombreux pays signèrent le Protocole avec des réserves leur permettant d'utiliser des armes chimiques contre des pays n'ayant pas adhéré au Protocole ou de riposter de la même manière en cas d'attaque à l'arme chimique. Depuis l'entrée en vigueur du Protocole de Genève, certains de ces États parties ont levé leurs réserves et accepté une interdiction absolue d'employer des armes chimiques et biologiques.


En 1971, le Comité des dix-huit puissances sur le désarmement (qui est devenu la Conférence du désarmement) a mené à bien la négociation du texte de la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication et du stockage des armes bactériologiques (biologiques) ou à toxines, communément appelée la Convention sur les armes biologiques. Concurremment avec le Protocole de Genève de 1925, ce traité interdisait aux États parties de mettre au point, de fabriquer ou de posséder des armes biologiques, mais ne prévoyait aucun mécanisme permettant de vérifier le respect de ces interdictions par les États parties. La Convention précisait que les pays s'engageaient à négocier un traité international interdisant les armes chimiques. En 1986, l'industrie chimique du monde entier a commencé à participer activement à ces négociations.


À la différence de la Convention sur les armes biologiques, les négociateurs de l'interdiction des armes chimiques ont décidé que cette interdiction serait soumise à une vérification internationale. À cette fin, des inspections expérimentales d'installations industrielles et militaires furent conduites à partir de la fin de 1988.


Le 3 septembre 1992, le comité spécial a soumis à la Conférence du désarmement le texte convenu de la Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et leur destruction, maintenant communément appelée la Convention sur les armes chimiques. La Convention sur les armes chimiques a été ouverte à la signature à Paris, le 13 janvier 1993, et par la suite déposée auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, à New York.


D'après les termes de la Convention sur les armes chimiques, celle-ci entre en vigueur le cent quatre-vingtième jour qui suit la date de dépôt du soixante-cinquième instrument de ratification. Pour préparer l'entrée en vigueur du traité et la mise en oeuvre du régime de vérification, une Commission préparatoire fut instituée en 1993. Elle avait pour mission de jeter les bases nécessaires à la création de l'institution permanente chargée d'appliquer la Convention sur les armes chimiques : l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques ou OIAC. La Commission préparatoire siégeait à La Haye, où a ensuite été installé le Siège de l'OIAC. Outre la préparation des orientations relatives à la mise en oeuvre de la Convention, l'une des tâches essentielles de la Commission préparatoire consistait à former 200 inspecteurs à effectuer des inspections des sites militaires et industriels du monde entier, pour s'assurer du respect de la Convention.


À la fin de 1996, la Hongrie devenait le 65e pays à ratifier la Convention et le 29 avril 1997, avec 87 États parties, la Convention sur les armes chimiques entrait en vigueur et acquérait force exécutoire au regard du droit international (22 autres pays avaient ratifié le traité dans les 180 jours écoulés entre la ratification par la Hongrie et l'entrée en vigueur).


Dès l'entrée en vigueur de la Convention, l'OIAC commença d'oeuvrer pour la mise en œuvre de cet instrument. La Convention et son organe d'exécution sont censés non seulement s'adapter aux modifications de l'environnement international et à l'évolution des besoins des États parties, mais aussi répondre au rythme rapide des progrès scientifiques et techniques.


Tous les cinq ans, aux termes de la Convention, les États parties doivent faire le point sur l'état de la mise en oeuvre. L'objectif des conférences d'examen est d'étudier et d'évaluer la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques, et de déterminer les secteurs où des changements s'imposent, en mettant l'accent sur le régime de vérification et les conditions de son application, ainsi que sur les progrès scientifiques et techniques dans les domaines de la chimie, de l'ingénierie et de la biotechnologie. La première Conférence d'examen a eu lieu du 28 avril au 9 mai 2003.


Armes chimiques : Étapes marquantes de leur emploi et de leur interdiction


1675    Accord de Strasbourg    Premier accord international limitant l'emploi des armes chimiques, en l'occurrence des balles empoisonnées.

1874    Convention de Bruxelles sur les lois et coutumes de la guerre    La Convention de Bruxelles interdisait l'emploi de poison ou d'armes empoisonnées et l'emploi d'armes, projectiles ou matériel causant des souffrances inutiles.

1899/1907    Conférences de la paix de La Haye    Interdictions de l'emploi d'armes empoisonnées, de "gaz asphyxiants ou délétères".

1915-1918    Europe, Première Guerre mondiale    1,3 million de victimes, 90 000 morts. Premier emploi d'armes chimiques à grande échelle : Ypres (Belgique).

1925    Protocole de Genève    Interdiction de l'emploi des armes chimiques, mais pas d'interdiction de la mise au point etc. – interprété par certains États comme "pas de première frappe" – 132 parties en 2000.

1972    Convention sur les armes biologiques ou à toxines    Interdiction totale des armes biologiques – 143 parties, 17 signataires en 2000; mais pas de mécanisme de vérification; engagement à négocier un accord sur les armes chimiques.

1980's    Guerre Iran-Iraq    Y compris l'emploi par l'Iraq d'agents d'armes chimiques contre ses propres populations civiles à Halabja en 1988.

1993    Convention sur les armes chimiques    Signature de la Convention sur les armes chimiques à Paris en janvier; interdiction totale de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi d'armes chimiques et fixation de délais pour leur destruction; création de la Commission préparatoire de l'OIAC.

1997    OIAC, La Haye    La Convention sur les armes chimiques entre en vigueur pour 87 États parties; l'OIAC commence ses opérations à La Haye; les inspections commencent en juin 1997.

2003    Sixième anniversaire de l'entrée en vigueur    L'OIAC compte 153 États membres et a effectué plus de 1 500 inspections sur le territoire de 56 États parties


La Convention sur les armes chimiques et l'OIAC

La Convention sur les armes chimiques


La Convention sur les armes chimiques se compose d'un préambule, de 24 articles et de trois annexes : Annexe sur les produits chimiques, Annexe sur la vérification et Annexe sur la confidentialité. Le Préambule exprime le plus succinctement la raison d’être de la Convention sur les armes chimiques, "… Résolus, dans l'intérêt de l'humanité tout entière, à exclure complètement la possibilité de l'emploi des armes chimiques, grâce à l'application des dispositions de la présente Convention […]". Il évoque ensuite les avantages de l'utilisation de la chimie à des fins pacifiques et la volonté de faciliter la liberté du commerce des produits chimiques et la coopération internationale dans le domaine des activités chimiques non interdites par la Convention.


L'Article premier définit les obligations générales de chaque État partie aux termes de la Convention. La Convention interdit aux États parties d'employer des armes chimiques et d'entreprendre des préparatifs militaires en vue d'un emploi d'armes chimiques. De même, les États parties ne doivent jamais "mettre au point, fabriquer, acquérir d'une autre manière, stocker ou conserver d'armes chimiques, ou transférer, directement ou indirectement, d'armes chimiques à qui que ce soit". Dans le même ordre d'idées, les États parties ne sont pas autorisés à promouvoir ou à favoriser d'activités - qu'elles soient le fait d'individus, de groupes ou d'un autre État - interdites par la Convention. En application de l'Article premier, chaque État partie doit détruire tous les stocks d'armes chimiques en sa possession ainsi que toutes les installations de fabrication d'armes chimiques situées sur son territoire et toutes les armes chimiques qu'il aurait pu abandonner sur le territoire d'un autre État partie. De même, aux termes de l'Article premier, l'emploi d’agents antiémeute (par exemple de gaz lacrymogènes) est interdit en tant que moyen de guerre.


L'Article II de la Convention sur les armes chimiques énonce les définitions et les critères à utiliser dans la mise en œuvre de la Convention. Il définit notamment les termes et expressions "armes chimiques", "produit chimique toxique", "précurseur", "armes chimiques anciennes", "armes chimiques abandonnées", "agent de lutte antiémeute", "installation de fabrication d'armes chimiques" et d'autres termes et expressions liés au régime de vérification de l'industrie, comme "capacité de production", "traitement", "consommation", etc.


L'Article III fait obligation à chaque État partie de présenter des déclarations à l'OIAC au plus tard 30 jours après l'entrée en vigueur de la Convention à son égard. Chaque État partie doit déclarer s'il possède des armes chimiques et/ou des installations de fabrication d'armes chimiques et présenter ses plans de destruction des armes chimiques et des installations de fabrication. Il doit aussi déclarer toute autre installation conçue pour la mise au point d'armes chimiques, comme les laboratoires, et s'il possède ou non des agents antiémeute. Chaque État partie doit aussi déclarer s'il a ou non sur son territoire des armes chimiques anciennes et s'il a abandonné des armes chimiques sur le territoire d'un autre État partie ou si un État partie a abandonné de telles armes sur son territoire. Les armes chimiques enterrées après 1977 ou déversées en mer après le 1er janvier 1985 sont également déclarables.


Les Articles IV et V concernent l'obligation incombant aux États parties de détruire leurs armes chimiques et leurs installations de fabrication d'armes chimiques, y compris de présenter des plans de destruction détaillés et des déclarations annuelles sur l'avancement des opérations de destruction. Les États parties ont la possibilité de demander la conversion des installations de fabrication d'armes chimiques à des fins pacifiques et non interdites. Ce sont les États parties eux-mêmes qui prennent à leur charge les coûts de destruction et/ou de conversion et les coûts de vérification par l'OIAC des activités de destruction. Il est prévu que les activités de destruction et/ou de conversion seront achevées au plus tard dix ans après l'entrée en vigueur de la Convention. La Convention prévoit la possibilité d'une prolongation unique de cinq ans au maximum (jusqu’en 2012) du délai final fixé pour la destruction des armes chimiques.


L'Article VI traite des "activités non interdites par la présente Convention", connues sous le nom de régime de non-prolifération ou de régime de vérification de l'industrie. Les États parties doivent s'assurer que les produits chimiques toxiques et leurs précurseurs ne sont mis au point, fabriqués, transférés et employés qu'à des fins pacifiques. Les installations qui fabriquent des produits chimiques inscrits et des produits chimiques organiques définis sont assujetties à des exigences en matière de contrôles et en matière de communication de renseignements que doivent mettre en œuvre les États parties, ainsi qu'à des inspections par l'OIAC.


L'Article VII, qui porte sur l'application de la Convention au niveau national, fait obligation à chaque État partie de promulguer une législation d'application à l'échelle nationale, d'intégrer les interdictions énoncées par la Convention dans la législation pénale nationale et d'informer l'OIAC des mesures adoptées pour mettre en œuvre la Convention. Aux termes de cet Article, les États parties s'engagent à coopérer dans les domaines de l'assistance juridique, de la sécurité et de l'environnement. De plus, cet Article prévoit la mise en place d'une autorité nationale pour assurer la liaison entre l'État partie et l'OIAC.


L'Article VIII porte création de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques, ou OIAC, comme instance de mise en oeuvre de la Convention et en fixe le Siège à La Haye (Pays-Bas). L'Organisation se compose de trois organes principaux : la Conférence des États parties, le Conseil exécutif et le Secrétariat technique. L'Article VIII délimite les pouvoirs et les fonctions de chaque organe (voir diagramme).


L'Article IX prévoit des consultations et des éclaircissements en cas de doute quant au non-respect éventuel de la Convention. Il prévoit en outre les procédures de demande et d'exécution d'une inspection par mise en demeure dans l'un quelconque des États parties s'il existe des doutes sur son respect de la Convention. Tout État partie peut demander une inspection par mise en demeure en tout endroit du territoire d'un autre État partie.


Les Articles X et XI traitent respectivement de la fourniture d'une assistance et d'une protection à un État partie en cas d'attaque ou de menace d'attaque à l'arme chimique, et de la coopération internationale pour le développement économique et technologique des États parties. Aux termes de l'Article X, chaque État partie est tenu d'informer l'OIAC des différents types d'appui qu'il peut apporter aux efforts en matière d'assistance et de protection. L'Article XI concerne la promotion du commerce des produits chimiques à des fins pacifiques et du développement de la chimie dans tous les États parties à des fins non interdites par la Convention.


L'Article XII porte sur les mesures propres à garantir le respect de la Convention y compris les sanctions à l'égard d'un État partie qui ne s'acquitte pas des obligations contractées. Outre l'application de mesures de redressement ou de sanctions, ou de restrictions des droits et privilèges, etc. la Conférence porte les cas d'une gravité particulière à l'attention de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies.


Les Articles XIII à XXIV traitent de différentes questions telles que les rapports avec d'autres accords internationaux, le règlement des différends, les amendements à la Convention, la durée et la dénonciation, l'entrée en vigueur, etc. Des trois annexes, l'Annexe sur la vérification est la plus étoffée. Elle précise toutes les procédures détaillées que les États parties et les équipes d'inspection de l'OIAC doivent suivre lors de la vérification ou de l'inspection des installations ou sites d'armes chimiques et d'installations de l'industrie. L'Annexe sur les produits chimiques présente les trois tableaux mentionnés précédemment (voir encadré). L'Annexe sur la confidentialité assure la protection des renseignements sensibles qui relèvent de la sécurité nationale et des données confidentielles des entreprises durant les inspections et lors de la communication de ces renseignements à l'OIAC par les États parties.


Quels sont les produits chimiques réglementés ?


Le Tableau 1 répertorie les produits chimiques qui ont été ou peuvent être facilement employés comme armes chimiques et qui sont très rarement - ou ne sont jamais- susceptibles d'être employés à des fins pacifiques. Ces produits sont soumis à des restrictions très strictes, notamment : un plafond de fabrication d'une tonne par année et par État partie, un plafond d'une tonne pour la quantité totale qu'un État partie donné peut détenir à tout moment, l'obligation d'une licence et les restrictions des transferts. Ces restrictions s'appliquent au nombre relativement peu élevé d'installations de l'industrie qui utilisent des produits chimiques du Tableau 1. Certains de ces produits chimiques sont employés dans la composition de préparations pharmaceutiques ou à des fins de diagnostic. La saxitoxine, produit chimique du Tableau 1, sert d'étalon de référence dans le cadre de programmes de contrôle d’intoxication par phycotoxine paralysante; elle est également utilisée dans la recherche neurologique. La ricine, autre produit chimique du Tableau 1, sert également dans la recherche biomédicale. Certains produits chimiques du Tableau 1 et/ou leurs sels sont utilisés en médecine comme agents antinéoplasiques. D'autres sont généralement fabriqués et employés à des fins de protection, par exemple pour tester le matériel de protection contre les armes chimiques et les alertes chimiques.


Le Tableau 2 répertorie les produits chimiques qui sont des précurseurs d'agents d'armes chimiques, ou, dans certains cas, peuvent être employés comme tels, mais qui se prêtent à d'autres utilisations commerciales (ingrédients entrant dans la composition de résines, ignifugeants, encres et teintures, insecticides, herbicides, lubrifiants ou matières premières de produits pharmaceutiques). Par exemple, le BZ est un produit chimique neurotoxique du Tableau 2 qui est également un produit intermédiaire industriel entrant dans la fabrication de produits pharmaceutiques comme le bromure de clidinium. Le thiodiglycol, précurseur de l'ypérite, entre également dans la composition d'encres à base aqueuse, de teintures et de certaines résines. Autre exemple, le méthylphosphonate de diméthyl, produit chimique lié à certains précurseurs d'agents neurotoxiques, utilisé comme ignifugeant dans les textiles et le plastique alvéolaire.


Le Tableau 3 répertorie les produits chimiques qui peuvent servir à fabriquer des armes chimiques ou être employés eux-mêmes comme armes chimiques, mais qui sont largement utilisés à des fins pacifiques (notamment dans les plastiques, les résines, l'exploitation minière, le raffinage du pétrole, les fumigants, les peintures, les enduits, les agents antistatiques et les lubrifiants). Parmi les produits chimiques toxiques du Tableau 3 on trouve le phosgène et le cyanure d'hydrogène, qui ont été employés comme armes chimiques mais qui servent aussi à fabriquer des résines de polycarbonate et des plastiques de polyuréthane, ainsi que certains produits chimiques agricoles. La triéthanolamine, précurseur de l'ypérite à l'azote, entre dans la composition de nombreux détergents (comme les shampooings, les bains moussants et les produits ménagers) et elle est utilisée dans la désulfuration des courants de gaz combustibles.


Produits chimiques organiques définis


Les produits chimiques organiques définis (PCOD) ne sont répertoriés ni dans les tableaux, ni ailleurs dans la Convention. Les unités de fabrication de PCOD sont appelées "autres installations de fabrication de produits chimiques". Ces sites d'usines sont assujettis à des obligations de déclaration et de vérification si leur production globale de PCOD excède 200 tonnes par an. Ils sont également assujettis à ces obligations s'ils contiennent des usines où sont fabriquées plus de 30 tonnes de tout PCOD contenant du phosphore, du soufre ou du fluor (produits chimiques PSF). Des milliers de sites d'usines de ce type ont été déclarés au Secrétariat technique.


Organisation pour l'interdiction des armes chimiques


L'Article VIII de la Convention porte création de l'OIAC et en fait l'organe de mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques. L'OIAC a pour mandat " […]de réaliser l'objet et le but de la […] Convention, de veiller à l'application de ses dispositions, y compris celles qui ont trait à la vérification internationale du respect de l'instrument, et de ménager un cadre dans lequel [les États parties] puissent se consulter et coopérer entre eux."


Le Secrétariat technique de l'OIAC est chargé de la gestion quotidienne et de la mise en oeuvre de la Convention, notamment des inspections, alors que le Conseil exécutif et la Conférence des États parties sont les organes de décision, dont le rôle principal est de décider des questions de politique générale et de régler les différends entre les États parties portant sur des questions techniques ou sur l'interprétation de la Convention. Les présidents du Conseil exécutif et de la Conférence sont désignés par les membres de chacun de ces deux organes. Le Secrétariat technique est dirigé par un Directeur général nommé par la Conférence sur recommandation du Conseil.


La Convention prévoit également la création de trois organes subsidiaires, chargés d'assister dans leurs tâches les trois organes principaux de l'OIAC : le Conseil scientifique consultatif, l'Organe consultatif sur les questions administratives et financières, ainsi que la Commission de la confidentialité.


Le Conseil scientifique consultatif est un groupe d'experts indépendants chargés d'évaluer les innovations scientifiques et techniques pertinentes et d'en rendre compte au Directeur général. Par ailleurs, il dispense des avis d'experts sur toute proposition de modification des tableaux de produits chimiques et tout autre avis qui se révélerait nécessaire, notamment sur des questions telles que la méthodologie et le matériel de vérification.


En tant qu'organe subsidiaire de la Conférence des États parties, la Commission de la confidentialité a pour principale fonction de régler les litiges éventuels entre les États parties en matière de confidentialité.


L'Organe consultatif sur les questions administratives et financières se réunit régulièrement pour conseiller le Secrétariat technique et les États parties sur des questions liées aux budgets-programmes de l'OIAC. Il examine les projets de budget que le Secrétariat technique établit, avant leur présentation au Conseil et à la Conférence pour approbation.


Mise en oeuvre du régime

Responsabilités des États parties


La Convention sur les armes chimiques ne peut pas être mise en oeuvre avec succès sans les efforts constants et appliqués des États membres de l'OIAC.


Tout État qui devient partie à la Convention doit prendre plusieurs mesures internes pour respecter la Convention et assurer le bon fonctionnement du mécanisme de vérification. Vu la complexité du traité, ce n'est pas une tâche facile. Les mesures internes comprennent notamment les préparatifs en vue de la destruction des stocks d'armes chimiques puis leur destruction, le contrôle et la réglementation des industries chimiques et la modification de lois nationales et de règles administratives.


La première obligation qui incombe à un État partie, dès l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes chimiques à son égard, est de mettre en place son autorité nationale, qui sert de centre national en vue d'assurer une liaison efficace avec l'Organisation et les autres États parties, et d'en informer l'Organisation. Les tâches principales de l'autorité nationale consistent notamment à coordonner la présentation des déclarations à l'Organisation, à contrôler le commerce national des produits chimiques inscrits à un tableau et à surveiller le déroulement de tout programme de destruction d'armes chimiques. Une autorité nationale peut être aussi appelée à travailler avec d'autres organes du pouvoir exécutif ou du pouvoir législatif national à l'établissement et à la promulgation d'une législation d'application appropriée, de manière à intégrer la Convention sur les armes chimiques et ses interdictions et obligations dans le droit interne.


Tout État doit respecter l'obligation fondamentale de présenter une déclaration initiale, au plus tard 30 jours après l'entrée en vigueur de la Convention à son égard. Le même délai s'applique à d'autres notifications requises concernant les points d'entrée, les numéros permanents d'autorisation diplomatique pour les appareils effectuant des vols non réguliers et la délivrance de visas d'entrées multiples de deux ans, pour faciliter la conduite des inspections. Dans sa déclaration initiale, chaque État partie fait état de tout programme d'armes chimiques passé ou en cours, ainsi que de la présence éventuelle d'armes chimiques anciennes et/ou abandonnées sur son territoire ou qu'il aurait abandonnées sur le territoire d'un autre État. Toutes ces armes chimiques doivent être détruites au plus tard dix ans après l'entrée en vigueur de la Convention, c'est-à-dire en 2007. Les installations de fabrication d'armes chimiques déclarées par un État partie doivent cesser leurs activités dans un délai de 90 jours à compter de l'entrée en vigueur de la Convention à l'égard de cet État partie, et ces installations doivent également être détruites au plus tard en 2007. Après leur neutralisation, ces anciennes installations de fabrication doivent être détruites ou converties à des fins pacifiques. La Convention prévoit la possibilité d'une prolongation unique de cinq ans (jusqu’en 2012) des délais finals de destruction des stocks d'armes chimiques. Une demande de prolongation doit être soumise au Conseil exécutif et approuvée par la Conférence des États parties. Dans des circonstances particulières et sous réserve de l'approbation des autres États membres, les installations de fabrication de produits chimiques peuvent être converties à des fins pacifiques.


Tout État partie est aussi tenu de présenter au Secrétariat technique, au plus tard 30 jours après l'entrée en vigueur de la Convention à son égard, une déclaration initiale aux termes de l'Article VI, ou déclaration de l'industrie, contenant des détails sur toute installation située sur son territoire et fabriquant ou dans certains cas fabriquant ou consommant des produits chimiques inscrits à un tableau en quantités supérieures à certains seuils. Les États parties dotés d'une industrie chimique engagée dans des activités de ce type doivent présenter des déclarations annuelles d'activités passées et prévues de l'industrie et d'exportations et d'importations de produits chimiques inscrits. Les États parties ayant des programmes de destruction d'armes chimiques doivent également présenter des déclarations annuelles en rapport avec la mise en œuvre de ces programmes.


Destruction/conversion


L'obligation fondamentale qu'impose la Convention est la destruction des armes chimiques. C'est également l'aspect le plus onéreux de l’application de la Convention.


La majorité des coûts de la destruction sont constitués par des investissements dans des techniques de pointe, qui réduisent au minimum le risque pour la population et l'environnement à chaque étape du transport et de la destruction des munitions, ainsi que durant le déplacement et la destruction des agents chimiques. Par conséquent, la destruction doit avoir lieu dans des installations hautement spécialisées.


Il existe deux techniques principales de destruction des agents chimiques : l'incinération directe et la neutralisation au moyen de diverses réactions chimiques. La recherche se poursuit sur d'autres méthodes. Il appartient à chaque État partie de se prononcer sur la technique de destruction qu'il souhaite appliquer, à condition que la destruction soit conforme à des normes strictes de protection de l'environnement, qu'elle soit complète et irréversible et que l'aménagement de l'installation permette une vérification appropriée. Il est important que la recherche de nouvelles techniques de démilitarisation et de destruction des armes chimiques se poursuive, pour que des procédés plus économiques et plus écologiques soient mis au point.


Les États parties doivent présenter au Secrétariat technique des plans détaillés définissant les procédés de destruction qui seront employés ainsi que les délais prévus. Ces plans doivent être présentés pour chaque installation de destruction d'armes chimiques – c'est-à-dire là où est effectuée la destruction des armes chimiques – ainsi que pour chaque installation de fabrication d'armes chimiques à détruire. De même, si une installation de fabrication d'armes chimiques doit être convertie, des plans détaillés du procédé de conversion doivent être présentés. Les plans de destruction et/ou de conversion sont soumis au Conseil exécutif pour approbation. Si cette approbation tarde, la destruction peut commencer sous la surveillance continue d'inspecteurs de l'OIAC.


La destruction d'armes chimiques anciennes et/ou abandonnées est particulièrement difficile et potentiellement dangereuse. À la longue, les munitions chimiques anciennes ou abandonnées deviennent souvent plus instables, ce qui accroît le risque de détonation de l'explosif ou de contamination chimique. À titre prioritaire, la destruction de ces armes est en cours dans un petit nombre d'États parties. Pendant les années qui suivirent la Deuxième Guerre mondiale, des milliers de tonnes d'agents et de munitions chimiques furent déversées dans la mer Baltique et la mer du Nord, ainsi que dans d'autres étendues d'eau de par le monde. Ces armes ne sont pas visées par la Convention, qui fait obligation de ne déclarer à l'OIAC que les armes chimiques déversées en mer après le 1er janvier 1985.


Non-prolifération


Les États parties réglementent l'utilisation des produits chimiques inscrits par l'industrie implantée sur leur territoire et préparent celle-ci à recevoir des inspections régulières de l'OIAC, destinées à vérifier que les produits chimiques inscrits et les "produits chimiques organiques définis" (PCOD) sont exclusivement employés à des fins pacifiques.


La Convention prescrit le contrôle rigoureux du transfert des produits chimiques du Tableau 1 entre États membres; elle l'autorise uniquement à des fins de recherche, à des fins médicales ou pharmaceutiques ou à des fins de protection, et en quantités limitées; elle interdit leur transfert vers des États non parties. Une interdiction comparable du transfert des produits chimiques du Tableau 2 vers des États non parties est entrée en vigueur en avril 2000. La liberté du commerce des produits chimiques du Tableau 2 est autorisée entre les États parties. Le transfert des produits chimiques du Tableau 3 vers des États parties et non parties est autorisé. Toutefois, l'État non partie destinataire est tenu de fournir un certificat d'utilisation finale, pour garantir que les produits chimiques sont employés à des fins pacifiques. La Convention prévoit en effet que les États parties puissent prendre des mesures supplémentaires sur le transfert des produits chimiques du Tableau 3 vers des États non parties, cinq ans après l'entrée en vigueur de la Convention.


Outre l'obligation concernant les certificats d'utilisation finale pour les transferts de produits chimiques du Tableau 3, les États parties sont tenus de surveiller minutieusement les exportations et les importations de tous les produits chimiques inscrits à un tableau et de communiquer ces informations au Secrétariat technique une fois par an.


Vérification par l'OIAC


Dans la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques, c'est la vérification qui constitue l'activité centrale du Secrétariat technique.


Aux termes de la Convention et de son Annexe sur la vérification, le Secrétariat technique est chargé non seulement de vérifier la destruction des stocks d'armes chimiques et des installations de fabrication d'armes chimiques, mais aussi de s'assurer que les produits chimiques inscrits à un tableau sont employés exclusivement à des fins autorisées. Au sein du Secrétariat technique, c'est l'Inspectorat de l'OIAC, composé d'inspecteurs ayant reçu une formation spécifique, qui procède aux inspections de sites militaires et industriels.


Des équipes d'inspecteurs de l'OIAC effectuent des vérifications dans le monde entier et, dans certains cas, de façon continue. La procédure de vérification est appliquée de manière objective et transparente : tous les États parties sont traités de façon équitable et leur sécurité nationale est dûment respectée.


La taille d'une équipe d'inspection varie de façon considérable en fonction du type de l'installation inspectée et du type d'inspection. De même, la composition de chaque équipe varie selon le type d'installation. Par exemple, il se peut qu'une équipe envoyée pour vérifier la destruction d'armes chimiques ait besoin de spécialistes dans des domaines comme les techniques d'armes ou de munitions chimiques, les techniques de fabrication des produits chimiques, la chimie analytique ainsi que la santé et la sécurité. D'un autre côté, une équipe envoyée pour inspecter une installation de l'industrie chimique pourra être constituée de spécialistes dans les domaines des techniques de fabrication des produits chimiques, de la chimie industrielle, de la logistique de la fabrication des produits chimiques et de la chimie analytique.


Si les conditions du site d'inspection ne permettent pas l'analyse d'échantillons, ceux-ci peuvent être envoyés hors site pour analyse dans des laboratoires spécifiquement désignés. Pour être désigné, un laboratoire d'un État partie doit obtenir d'excellents résultats à plusieurs essais d'aptitude de l'OIAC, puis se soumettre régulièrement à des essais pour conserver son statut. S'il faut envoyer un échantillon pour analyse hors site, des procédures rigoureuses seront suivies pour que la garde permanente soit assurée afin d'éviter toute tentative d'altération frauduleuse et de garantir le caractère anonyme de l'échantillon.


La Convention prévoit trois types d'inspections ou d'enquêtes : les inspections de routine, les inspections par mise en demeure et les enquêtes sur des allégations d'emploi.


Les inspections de routine sont conduites dans les installations déclarées de stockage, de fabrication et de destruction d'armes chimiques, ainsi que dans les installations industrielles déclarées qui fabriquent, traitent ou, dans certains cas, consomment des produits chimiques inscrits aux trois tableaux de la Convention, ou encore qui fabriquent des PCOD non inscrits à un tableau, en quantités supérieures à des seuils définis. Ces inspections ont pour finalité de vérifier l'exactitude des renseignements communiqués par les États parties dans leurs déclarations initiales et annuelles et de garantir que les activités des États parties sont conformes à la Convention.


Les inspections par mise en demeure sont prévues par la Convention qui donne à chaque État partie le droit de demander au Directeur général de faire effectuer, à bref délai, une inspection par l'OIAC sur le territoire de tout État partie ou en tout lieu placé sous la juridiction ou le contrôle de tout autre État partie, afin d'élucider et de résoudre toutes questions liées à un non-respect éventuel de la Convention.


Une enquête sur une allégation d'emploi peut être conduite par l'OIAC à la demande d'un État partie, soit pour confirmer l'emploi effectif ou la menace d'emploi d'armes chimiques, soit pour évaluer le besoin d'assistance, ou les deux à la fois.


Durant toutes les activités de vérification de l'OIAC - réception et traitement des déclarations et des plans de destruction ou de conversion, inspections et surveillance sur place – il est veillé au respect rigoureux du régime de confidentialité de l'OIAC. Le Secrétariat technique protège tous les renseignements officiels en sa possession, conformément à de strictes règles de sécurité. Les renseignements relevant du secret-défense communiqués par les États parties, ainsi que les documents classés confidentiels établis par le Secrétariat sur la mise en œuvre du régime de vérification, sont traités électroniquement sur un réseau sécurisé, dont l'accès est strictement limité.


Appui à la mise en œuvre de la Convention


La Convention prescrit la mise en place au niveau national de procédures de communication de l'information et de mesures réglementaires complexes. Par ailleurs, chaque État partie doit informer l'Organisation des mesures législatives et administratives adoptées pour mettre en œuvre la Convention. En l'absence de mesures nationales de contrôle appropriées, il est impossible d'atteindre, de manière crédible, l'objet et le but de la Convention dans des domaines clés tels que la non-prolifération.


La Convention reconnaît que pour respecter ces obligations importantes les États parties peuvent avoir besoin de l'aide de l'Organisation. Le Secrétariat fournit aux États parties une assistance et une évaluation techniques pour la mise en œuvre des dispositions de la Convention.


Actuellement, les programmes d'appui à la mise en œuvre de la Convention comprennent : assistance technique juridique; cours de formation à l'intention des autorités nationales; réunion annuelle des autorités nationales; réunions régionales des autorités nationales; ateliers thématiques sur les questions prioritaires de mise en oeuvre; missions et séminaires d'assistance technique dans les pays; réseaux d'experts; dossiers d'information à l'intention des autorités nationales; outils électroniques destinés aux autorités nationales pour que celles-ci communiquent dans un format électronique commun les déclarations requises par la Convention sur les armes chimiques; sites Internet des autorités nationales et autres documents ou renseignements pertinents affichés sur le site Internet de l'OIAC (www.opcw.org).


Assistance en matière législative


Pour garantir l'adoption d'une législation d'application efficace – donnant effet à toutes les dispositions de la Convention, en les intégrant à la législation nationale de chaque État partie - le Secrétariat technique et les États membres travaillent de concert pour dispenser une assistance juridique aux États parties ou aux États non parties prêts à adhérer à la Convention, qui pourraient avoir besoin d'aide dans ce domaine.


Coopération internationale


Encourager la coopération internationale pour la mise en oeuvre de la Convention et promouvoir les utilisations pacifiques de la chimie constituent l'un des objectifs de la Convention. Après l'entrée en vigueur de la Convention, l'OIAC a lancé une série de programmes divers pour aider les États parties à renforcer leurs capacités techniques et scientifiques dans le domaine de l'utilisation pacifique de la chimie. Une assistance est fournie à des laboratoires financés par des fonds publics, afin qu'ils accroissent leurs capacités techniques. L'OIAC appuie ou co-parraine des projets de recherche dans des domaines pertinents de la chimie. De plus, elle exploite un service d'information à l'intention d'entreprises, de particuliers et de représentants de pays en développement. Ce service gratuit fournit des renseignements sur les produits de remplacement des substances toxiques, sur les données sanitaires et de sécurité concernant les produits chimiques toxiques et sur les questions relatives à la mise en oeuvre de la Convention ou à ses incidences pour certains types d'entreprises commerciales de l'industrie chimique. L'OIAC assure également un cours de formation annuel – le Programme des scientifiques associés – à l'intention de chimistes et d'ingénieurs chimistes d'États membres dont les économies sont en développement ou en transition. Le Programme des scientifiques associés offre une expérience théorique et pratique dans la mise en œuvre de la Convention et assure une formation dans des installations industrielles chimiques modernes.


Assistance et protection


Aux termes de l'Article X de la Convention, chaque État partie a le droit de demander et de recevoir l'assistance et la protection de l'OIAC si :


‍ • des armes chimiques ont été employées contre lui;


‍ • des agents antiémeute ont été employés contre lui en tant que moyens de guerre;


‍ • il est menacé par des actes ou des activités d'un État quel qu'il soit, interdits aux États parties en vertu de l'Article premier de la Convention.


La Convention fait obligation aux États parties d'informer l'OIAC des éventuels programmes nationaux de protection et de contribuer aux moyens de protection de l'OIAC, notamment en fournissant du matériel et/ou du personnel ou en versant des contributions au Fonds de contributions volontaires pour l'assistance.


L'OIAC a pris des dispositions pour intervenir et agir d'urgence si le besoin s'en faisait sentir. Ces dispositions comprennent la coordination et la mobilisation de mécanismes internationaux de réponse à des demandes d'assistance, ainsi que la mise en place d'une structure d'intervention concertée pour donner suite aux demandes d'assistance et de protection contre les armes chimiques.


L'OIAC assure des cours de formation, des séminaires et des ateliers de coordination tout au long de l'année, pour aider à préparer le Secrétariat technique et les États parties à protéger les populations civiles des attaques chimiques, et répondre d'urgence par des mesures d'assistance et de protection appropriées.


Universalité de la Convention


L'adhésion universelle à la Convention sur les armes chimiques, "l'universalité de la Convention", est un objectif fondamental de l'OIAC. L'universalité est une nécessité si l'Organisation doit remplir son mandat, à savoir "exclure complètement la possibilité de l'emploi des armes chimiques".


L'universalité de la Convention ne contribuerait pas seulement à renforcer l'interdiction mondiale des armes chimiques : elle servirait aussi de base aux efforts déployés par la communauté internationale pour priver de tout sanctuaire potentiel toute personne ou groupe de personnes, notamment les terroristes, qui tenteraient de mettre au point et/ou d'employer des armes chimiques en violation de la Convention.


source : OIAC (Organisation pour l'interdiction des armes chimiques)



6- Protocole de Genève


Protocole concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques


Pour en savoir plus


Texte du Protocole


État du Protocole


Traité multilatéral interdisant l'emploi d'armes chimiques et biologiques, signé le 17 juin 1925 et entré en vigueur le 8 février 1928. Le Gouvernement français en est le dépositaire.


Le Protocole interdit l'emploi à la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que de tous liquides, matières ou procédés analogues, et de moyens de guerre bactériologiques.


Il n'interdit toutefois pas la mise au point ni la possession de produits chimiques toxiques et d'armes, ni leur utilisation dans des situations autres que de guerre.


Au moment de leur adhésion, de nombreux États firent des réserves par lesquelles ils se réservaient le droit de riposter avec des armes chimiques contre toute attaque chimique lancée contre eux ou contre des pays non membres du Protocole. Nombre de ces réserves furent toutefois retirées par la suite.


Le Protocole de Genève ne prévoit aucun mécanisme international de vérification. Un certain nombre de résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies donnent toutefois au Secrétaire général de l'ONU la possibilité d'engager des enquêtes en cas d'allégations de non-respect.


Sources un.org



7- Les armes chimiques, bombe atomique du pauvre


La mort de 1302 Syriens atteints de symptômes neurotoxiques oblige la communauté internationale à réagir. Le point sur une arme interdite.

Corine Chabaud

Publié le 27/08/2013 à 17h49, mis à jour le 27/08/2013 à 18h46


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L’attaque massive a eu lieu à la Ghouta, dans la banlieue est de Damas, le 21 août. Dans les hôpitaux et centres de soin clandestins environnants, les médecins ont vu une foule de victimes affluer, atteints des mêmes symptômes : difficultés à respirer, hyper­salivation, muscles contractés, convulsions, pupilles dilatées. Sans lésion ni plaie sanglante. Les médecins ont distribué de rares ampoules d’atropine, un antidote efficace contre les attaques au sarin, traitement que la France, notamment, expédie aux opposants depuis juin : à peine de quoi sauver quelques malades.


Le bilan est lourd : 1302 Syriens seraient morts, dont une grande partie de femmes et d’enfants, très vulnérables, souvent asphyxiés dans leur sommeil. Prudente, l’ONG Médecins sans frontières, présente sur place, a signalé « 355 morts avec des symptômes neurotoxiques ». Avant que les inspecteurs de l’Onu, emmenés par le Suédois Åke Sellström, d’abord pris pour cibles par des snipers, parviennent à prélever des échantillons, en quête de preuves formelles. Pour faire la vérité sur ce crime a priori commis par le régime de Bachar el-Assad qui, soutenu par Moscou, qualifie d’« insensées » ces accusations : l’utilisation, non plus ponctuelle et limitée, mais massive, des armes chimiques. Un massacre propre à bouleverser la communauté internationale, désormais peut-être en passe, sous l’égide des États-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne, de lancer une intervention armée.


Il est de notoriété internationale que la Syrie possède un vaste stock d’armes chimiques, supposées être « l’arme atomique du pauvre ». « Les Syriens ont réussi à maîtriser la synthèse des organophosphorés, la dernière génération la plus efficace et toxique des armements chimiques », explique Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique. Le régime de Damas s’en est doté dans les années 1970, après les deux conflits avec Israël en 1967 et 1973. Ce sont d’abord l’Égypte puis l’URSS et enfin l’Iran qui lui ont fourni un arsenal, avant que Damas ne produise lui-même ce matériel sophistiqué, aussi dangereux que vicieux, des vésicants, qui irritent la peau et les muqueuses comme le fameux gaz moutarde, aux terribles neurotoxiques organophosphorés. La Syrie posséderait ainsi le plus important arsenal chimique du Moyen-Orient. En particulier des agents chimiques neurotoxiques mortels tels que le tabun, le sarin et le très dangereux car très puissant VX. Des gaz létaux à faibles doses, inodores et incolores.


À l’été 2012, le général responsable du programme d’armement chimique a fait défection pour rejoindre les rebelles syriens. Selon le Centre d’études de sécurité international et de maîtrise des armements, « plusieurs sites de production auraient été identifiés près d’Alep, Homs, Lattaquié et Hama. (…) Les deux principaux sites de stockage se situeraient à l’est de Damas et près de Homs ».


Arme de terreur, l’arme chimique utilisée massivement lors du premier conflit mondial, a été officiellement bannie par la communauté internationale dès 1993. Si elle effraie à présent, c’est d’abord parce qu’elle pourrait être utilisée lors d’attaques terroristes, péril du XXIe siècle. Au Japon, la menace s’est concrétisée en 1995, quand la secte Aum a lancé dans le métro de Tokyo une attaque au sarin. Bilan : 12 morts et plus de 5000 blessés. Produit liquide et volatile, le sarin, mis au point en 1939, est une petite molécule diffusée sous forme d’aérosol ou de vapeur qui, inhalé ou projeté sur la peau, pénètre dans le sang et dérègle le système nerveux, provoquant une mort rapide. En Allemagne, en 1996, la police avait aussi saisi des fichiers d’un groupe néonazi relatifs à la confection de gaz moutarde. En France, en 2005, Dominique de Villepin avait évoqué « de nouvelles méthodes » terroristes : la tentative « d’accéder à des armes de destruction massive, notamment chimiques, biologiques et radiologiques ». La police venait de découvrir qu’un groupe de La ­Courneuve préparait un attentat au gaz cyanuré !


Il reste que la production de neurotoxiques n’est pas chose aisée, encore moins leur stockage et leur conditionnement. Et que l’on peut s’en prémunir, par exemple au moyen d’atropine et de ­benzodiazépine. Plus difficilement, de masques à gaz – ces jours-ci, en Israël, la population s’en équipe pourtant abondamment. En outre, de nombreux États s’évertuent à présent à mettre au point, dans leurs laboratoires civils et militaires, de nouvelles générations d’antidotes, contrepoisons efficaces. Des crèmes antitoxiques sont même à l’étude, capables d’arrêter le poison dans le sang avant qu’il n’ait commis des dégâts. « Des bio-épurateurs qui vont jouer le rôle d’éponges antitoxiques pour stopper la progression vers les neurones », expliquait en août un article du magazine Science et Vie. Des informations qu’on hésite à trouver rassurantes.


Des armes prohibées


Élaborée à Paris en 1993 et entrée en vigueur en 1997, la Convention sur l’interdiction des armes chimiques (Ciac) vise à « l’élimination complète des armes chimiques dans le monde entier ». À présent ratifiée par 189 États, elle en interdit l’usage, la détention et la production. Un grand progrès : le protocole de Genève, en 1925, après les ravages de la Grande Guerre, avait prohibé leur utilisation mais pas leur possession ni leur fabrication. Les pays signataires de la Ciac se sont même engagés à détruire leurs stocks. La France l’aurait fait, mais la Russie, le Japon, la Libye et les États-Unis pas encore en totalité. En 2013, sur plus de 71000 tonnes des stocks déclarés dans le monde, il en restait environ 15000 à éliminer. Restent cinq pays qui n’ont pas signé la Ciac : l’Angola, la Corée du Nord, l’Égypte, le Soudan et… la Syrie.


https://www.lavie.fr/actualite/geopolitique/les-armes-chimiques-bombe-atomique-du-pauvre-27348.php


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